Révision de la Constitution Haïtienne de 1806 (1816)
Révision des Titres I. II. III. IV. V. VI. VII. VIII. X. et XI. de la Constitution de 1806, proposée par le Sénat dans son Adresse au Peuple, en date du 6 Février dernier[1]
Le Peuple Haytien proclame, en présence de l’Etre Suprême, la présente Constitution de la République d’Haïti, pour consacrer à jamais sa Liberté et son Indépendance.
TITRE Ier
Dispositions Générales
Article Premier. Il ne peut exister d’esclaves sur le territoire de la République: l’esclavage y est à jamais aboli.
Art. 2. Toute dette contractée pour acquisition d’hommes est éteinte pour toujours.
Art. 3. Le droit d’asile est sacré et inviolable dans la République, sauf les cas d’exception prévus par la loi.
Art. 4. Le Gouvernement d’Haïti n’est point héréditaire il est électif.
Art. 5. La République d’Haïti ne formera jamais aucune entreprise dans les vues ni de faire des conquêtes ni de troubler la paix et le régime intérieur des Etats ou des Iles étrangères.
Art. 6. Les droits de l’homme en société sont la Liberté, l’Egalité, la Sûreté et la Propriété.
Art. 7. La Liberté consiste à pouvoir faire ce qui ne nuit pas aux droits d’autrui.
Art. 8. L’Egalité consiste en ce que la loi est la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse.
L’Egalité n’admet aucune distinction de naissance, aucune hérédité de pouvoirs.
Art. 9. La Sûreté résulte du concours de tous pour assurer les droits de chacun.
Art. 10. La Propriété est le droit de jouir et de disposer de ses revenus, de ses biens, du fruit de son travail et de son industrie.
Art. 11. La Propriété est inviolable et sacrée, toute personne soit par elle-même, soit par ses représentans a la libre disposition de ce qui est reconnu lui appartenir. Quiconque porte atteinte à ce droit se rend criminel envers la loi et responsable envers la personne troublée dans sa propriété.
Art. 12. La loi est la volonté générale exprimée par la majorité des Citoyens ou de leurs Représentans.
Art. 13. Ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché; nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas.
Art. 14. La ville du Port-au-Prince est déclarée Capitale de la République et le siège du Gouvernement.
Art. 15. Aucune loi civile ou criminelle ne peut avoir d’effet rétroactif.
Art. 16. La souveraineté réside essentiellement dans l’universalité des Citoyens; nul individu, nulle réunion partielle de Citoyens ne peut se l’attribuer.
Art. 17. Nul ne peut, sans une délégation légale, exercer aucune autorité ni remplir aucune fonction publique.
Art. 18. Les fonctions publiques ne peuvent devenir la propriété de ceux que les exercent.
Art. 19. La garantie sociale ne peut exister, si la division des pouvoirs n’est pas établie, si leurs limites ne sont pas fixées, et si la responsabilité des fonctionnaires n’est pas assurée.
Art. 20. Tous les devoirs de l’homme et du citoyen dérivent de ces deux principes gravés par la nature dans tous les cœurs. Ne faites pas a autrui ce que vous ne voudriez pas qu’on vous fit. Faites constamment aux autres, tout le bien que vous voudriez en recevoir.
Art. 21. Les obligations de chacun envers la société consistent à la défendre a la servir, à vivre soumis aux lois, et a respecter ceux qui en sont les organes.
Art. 22. Nul n’est bon citoyen, s’il n’est bon fils, bon père, bon frère, bon ami, bon époux.
Art. 23. Nul n’est homme de bien, s’il n’est franchement et religieusement observateur des lois.
Art. 24. Celui qui viole ouvertement les lois se déclare en état de guerre avec la société.
Art. 25. Celui qui, sans enfreindre ou vertement les lois, les élude par ruse ou par adresse, blesse les intérêts de tous et se rend indigne de leur bienveillance et de leur estime.
Art. 26. C’est sur le maintien des propriétés que reposent la culture des terres, toutes productions, tout moyen de travail et tout l’ordre social.
Art. 27. Tout citoyen doit ses services à la patrie et au maintien de la liberté, de l’égalité et de la propriété, toutes les fois que la loi l’appèle à les défendre.
Art. 28. La maison, de chaque citoyen est un asile inviolable. Pendant la nuit, nul n’a le droit d’y entrer que dans le cas d’incendie, d’inondation, ou de réclamation de l’intérieur de la maison.
Pendant le jour, on peut y entrer pour un objet spécial, déterminé ou par une loi ou par un ordre émané d’une autorité publique.
Art. 29. Aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu qu’en vertu d’une loi ou d’un ordre supérieur, et pour la personne ou l’objet expressément désigné dans l’acte qui ordonne la visite.
Art. 30. Nul ne peut être poursuivi; arrêté on détenu que dans les cas déterminés par la loi.
Art. 31. Nul ne peut être empêché de dire, écrire et publier sa pensée. Les écrits ne pourront être soumis à aucune censure avant leur publication. Nul n’est responsable de ce qu’il a publié que dans les cas prévus par la loi.
Art. 32. La responsabilité individuelle est formellement attachée à toutes les fonctions publiques.
Art. 33. La Constitution garantit l’aliénation des domaines nationaux, ainsi que les concessions accordées par le Gouvernement, soit comme gratification nationale ou autrement.
Art. 34. Les fêtes nationales instituées par les lois de la République seront conservées, savoir: celle de l’Indépendance d’Haïti, le premier Janvier de chaque année; celle de l’Agriculture, le premier de Mai; celle de la naissance d’Alexandre PETION, Président d’Haïti, sera solemnisée le deux d’Avril, en reconnaissance de ses hautes vertus.
Art. 35. Il sera créé et organisé un établissement général de secours publics, pour élever les enfans abandonnés, soulager les pauvres infirmes et fournir du travail aux pauvres valides qui n’auraient pu s’en procurer.
Art. 36. Il sera aussi créé et organisé une Institution publique, commune à tous les Citoyens, gratuite à l’égard des parties d’enseignement indispensable pour tous les hommes, dont les établissemens seront distribués graduellement dans un rapport combiné avec la division de la République.
Art. 37. Il sera fait des codes de lois civiles, criminelles et pénales, de procédure et de commerce, communs à toute la République.
Art. 38. Aucun blanc, quelle que soit sa nation, ne pourra mettre les pieds sur ce territoire à titre de maître ou de propriétaire.
Art. 39. Sont reconnus haïtiens, les blancs qui font partie de l’armée, ceux qui exercent des fonctions civiles, et ceux qui étaient admis dans la République à la publication de la Constitution du 27 Décembre 1806; et nul autre, à l’avenir, après la publication de la présente Révision, ne pourra prétendre au même droit, ni d’être employé, ni de jouir du droit de citoyen, ni acquérir de propriété dans la République.
TITRE II
Du Territoire
Art. 40. L’Ile de Haïti, (ci-devant appelée Saint-Domingue) avec les îles adjacentes qui en dépendent, forment le territoire de la République.
Art. 41. La République d’Haïti est une et indivisible; son territoire est distribué en Départemens, savoir les Départemens du Sud, de l’Ouest, de l’Artibonite et du Nord, dont les limites sont connus et désignés par la loi de l’Assemblée Centrale de Saint-Domingue, en date du 10 Juillet 1801. Les autres Départemens seront désignés par une loi qui fixera leur étendue.
Art. 42. Les Départemens seront divisés en Arrondissemens et Communes, dont le nombre et les limites seront également désignés par la loi.
Art. 43. Le Pouvoir Législatif peut changer et rectifier les limites des Départemens, Arrondissemens et Communes, lorsqu’il le juge convenable.
TITRE III
Etat Politique des Citoyens
Art. 44. Tout africain, indien et ceux issus de leur sang, nés des colonies ou pays étrangers, qui viendraient résider dans la République, seront reconnus haïtiens, mais ne jouiront des droits de citoyen qu’après une année de résidence.
Art. 45. Aucun haïtien ne pourra commencer sa carrière militaire qu’en qualité de simple soldat.
Art. 46. L’exercice des droits de citoyen se perd par la condamnation à des peines afflictives ou infamantes.
Art. 47. L’exercice des droits de citoyen est suspendu
1.° par l’interdiction judiciaire pour cause de fureur, de démence ou d’imbécilité.
2.° Par l’état de débiteur failli ou d’héritier immédiat, défenseur à titre gratuit, de tout ou partie de la succession d’un failli.
3.° Par l’état de domestique à gages.
4.° Par l’état d’accusation.
5.° Par un jugement de contumace, tant que le jugement n’est pas annéanti.
TITRE IV
De la Religion et des Mœurs
Art. 48. La Religion Catholique, Apostolique et Romaine étant celle de tous les Haïtiens, est celle de l’Etat, elle sera spécialement protégée ainsi que ses Ministres.
Art. 49. Tout autre culte religieux est permis dans la République, en se conformant aux lois.
Art. 50. La Constitution accorde au Président d’Haïti la faculté de solliciter, par la suite, de Sa Sainteté le Pape, la résidence dans la République d’un Evêque, pour élever à la Prêtrise les jeunes Haïtiens dont la vocation serait d’embrasser l’état ecclésiastique.
Art. 51. Le Pouvoir Exécutif assigne à chaque ministre de la religion l’étendue de son administration spirituelle. Ces ministres ne peuvent dans aucun cas former un corps dans l’Etat.
Art. 52. Le Mariage, par son institution civile et religieuse, tendant à la pureté des mœurs, les époux qui pratiqueront les vertus qu’exige leur état seront toujours distingués et spécialement protégés par le Gouvernement.
Art. 53. Les droits des enfans nés hors mariage seront fixés par des lois qui tendront à répandre les vertus sociales, à encourager et cimenter les liens des familles.
TITRE V
Du Pouvoir Législatif
Art. 54. Le Pouvoir Législatif réside dans une Chambre des Représentans des Communes et dans un Sénat.
Chambre des Representans des Communes
Art. 55. Il ne sera promulgué aucune Loi, que lorsque le projet en aura été proposé par le Pouvoir Exécutif, discuté et adopté par la Chambre des Représentans des Communes et dicérté par le Sénat.
Art. 56. La Chambre des Représentans des Communes se compose de Trois Membres pour la Capitale de la République, de Deux pour le Chef-lieu de chaque Département, et d’Un Membre pour chacune des Communes.
Art. 57. Elle établit les Contributions publiques, en détermine la nature, la quotité, la durée et le mode de perception;
Art. 58. Statue, d’après les bases établies par la Constitution, sur l’Administration;
Forme et entretient l’Armée;
Fait des Lois et des Réglemens, sur la manière de l’organiser et de la gouverner;
Fixe la valeur, le poids et le type des Monnaies;
Etablit l’étalon des poids et mesures qui seront uniformes pour toute la République;
Consacre définitivement et pour toujours l’aliénation des Domaines Nationaux;
Fait toutes les Lois nécessaires pour maintenir l’exercice des Pouvoirs définis et délégués par la Constitution;
Determine la formation et les attributions d’un Conseil de Notables dans chaque commune, pour statuer sur les détails d’Administration locale qui n’auront pas été prévus par les Lois:
En un mot, la Chambre de Représentans des Communes exerce l’Autorité Législative concurremment avec le Sénat.
Art. 59. Pour être Membre de la Chambre des Représentans des Communes, il faut être propriétaire, et âgé de Vingt-cinq ans au moins.
Art. 60. Les Représentans des Communes représentent la Nation entière et ne peuvent recevoir aucun mandat particulier.
Ils exercent leurs fonctions pendant cinq années et sont nommés ainsi qu’il suit:
Art. 61. Tous les cinq ans, du Premier au dix Février, les Assemblées Communales se forment dans chaque Commune, ou sont convoquées par une Adresse du Président d’Haïti, et nomment chacune parmi les citoyens du lieu, le nombre de députés prescrit par l’article 56.
Art. 62. Elles nomment en outre un suppléant pour remplacer le Député, en cas de mort, démission ou d’échéance.
Lesquels Députés ainsi nommés, se rendront au chef-lieu du Gouvernement, pour se constituer en Chambre de Représentans des Communes.
Art. 63. Les assemblées communales ne peuvent s’occuper d’aucun autre objet, que de ce qui leur est prescrit par la Constitution.
Leur police leur appartient; les élections se font au scrutin secret.
Art. 64. Tout citoyen convaincu d’avoir vendu ou acheté un suffrage, est exclu de toute fonction publique pendant 20 ans, et en cas de récidive, il l’est pour toujours.
Art. 65. Le Commissaire du Pouvoir Exécutif près le Tribunal Civil de chaque Département, ses Substituts et les Notaires remplissant ses fonctions dans les communes, sont tenus, sous peine de destitution, d’informer le Pouvoir Exécutif de l’ouverture et de la clôture des assemblées communales.
Ils ne peuvent se mêler de leurs opérations, ni entrer dans le lieu de leurs séances; mais ils peuvent demander communication du Procès-Verbal de chaque séance dans les 24 heures qui la suivent; et ils sont tenus de dénoncer au Pouvoir Exécutif les infractions qui seraient faites à l’Acte Constitutionel.
Dans tous les cas, la Chambre de Représentans des Communes prononce sur la validité des opérations des Assemblées Communales.
Art. 66. Il faut avoir atteint l’âge de majorité pour voter dans les assemblées communales.
Art. 67. La durée des assemblées communales ne pourra excéder dix jours.
Art. 68. Un représentant des communes peut être indéfiniment ré-élu en raison de sa bonne conduite.
Art. 69. Aussi-tôt la notification faite aux représentans de leur nomination, ils se rendront au Port-au-Prince pour exercer les fonctions qui leur sont attribuées: la majorité absolue des représentans réunis constitue la Chambre des Représentans des Communes.
Art. 70. Le lieu des séances de la Chambre des Représentant des Communes est fixé dans la Capitale.
Art. 71. Les Représentans des Communes s’assemblent le premier d’Avril de chaque année, dans le local préparé pour les délibérations de la Chambre.
Art. 72. Sa session est de trois mois au plus.
Art. 73. La Chambre des Communes reçoit annuellement le compte rendu par le Secrétaire d’Etat, qui lui est transmis par le Président d’Haïti: le débat, l’arrête et en ordonne la publicité.
Art. 74. Dans l’intervalle d’une session à une autre, le Président d’Haïti, peut la convoquer suivant l’exigeance des cas.
Art. 75. L’ouverture de chaque session de la Chambre des Représentans des Communes se fait par le Président d’Haïti en personne.
Art. 76. Si par invasion de l’ennemi ou par empêchement quelconque le Corps Législatif ne pouvait s’assembler au Port-au-Prince, le Sénat déterminera le lieu de sa réunion.
Art. 77. La Chambre des Représentans des Communes a le droit de police sur ses Membres, mais elle ne peut prononcer de peine plus forte que la Censure, ou les arrêts pour quinze jours.
Art. 78. Les Séances des Représentans des Communes sont publiques, elle peut cependant délibérer à huit clos, et ses délibérations sont rendues publiques par la voie d’un Journal, sous le titre de Bulletin des Lois.
Art. 79. Toute délibération de la Chambre des Communes, se prend par assise et levée; en cas de doute, il se fait un appel nominal, mais alors les vôtes sont secrets.
Art. 80. Les Membres de la Chambre des Communes reçoivent une indemnité évaluée à deux cens gourdes par mois, et une gourde; par lieue qu’ils auront à faire pour se rendre au siège du Gouvernement, laquelle indemnité est a la charge de leurs commune respective, d’après le mode qui sera établi par la loi.
Art. 81. Il y a incompatibilité entre les fonctions des Représentans des Communes et toutes fonctions publiques salariées par l’Etat.
Art. 82. Aucune proposition ne peut être délibérée ni adoptée par la Chambre des Représentans des Communes, qu’en observant les formes suivantes:
II se fait trois lectures de la proposition.
L’intervalle entre ces trois lectures ne peut être moindre de cinq jours; la discution est ouverte après chaque lecture: néanmoins, après la première et la seconde, la Chambre peut décider qu’il y a lieu à l’ajournement ou qu’il n’y a pas lieu à délibérer.
Toute proposition doit être distribuée deux jours avant la seconde lecture.
Art. 83. Après la troisième lecture, la Chambre décide s’il y a lieu ou non à l’ajournement.
Art. 84. Toute proposition soumise à la discussion et définitivement rejetée à la troisième lecture, ne peut être reproduite qu’après une année révolue.
Art. 85. Sont exemptes des formes prescrites par les articles ci-dessus, les propositions reconnues et déclarées urgentes par une délibération préalable de la Chambre.
Art. 86. La Chambre des Représentans des Communes envoie au Sénat dans les vingt-quatre heures, les lois rendues par elle, lesquelles ne peuvent être exécutées qu’après l’acceptation du Sénat.
Art. 87. Toute loi non acceptée par le Sénat, peut être représentée par la Chambre après le délai d’un an.
Art. 88. A quelque époque que ce soit, une proposition fesant partie d’un projet de loi déjà rejetté, peut néanmoins être reproduite dans un nouveau projet.
Art. 89. Les membres de la Chambre des Communes et ceux du Sénat, ne peuvent être recherchés, accusés ni jugés en aucun tems pour ce qu’ils ont dit ou écrit dans l’exercice de leurs fonctions.
Art. 90. Toute action civile peut être dirigée contre les membres de la Chambre des Communes; mais la contrainte par corps ne peut être exercée contre eux.
Art. 91. Pour faits criminels, ils peuvent être saisis en flagrant délit; mais il en est donné avis sans délai à la Chambre; et la poursuite ne pourra être continuée qu’après qu’elle aura ordonné la mise en jugement.
Art. 92. Hors le cas de flagrant délit, les Représentans des Communes ne peuvent être emmenés devant les officiers de police ni mis en état d’arrestation, avant que la Chambre n’ait ordonné la mise en jugement.
Art. 93. Dans les cas des deux articles précédens, un Représentant des Communes ne peut être traduit devant aucun autre Tribunal que la Haute Cour de Justice.
Art. 94. Ils sont traduits devant la même Cour pour les faits de trahison, de malversation, de manœuvre pour renverser la Constitution et d’attentat contre la sûreté intérieure de la République.
Art. 95. Aucune dénonciation contre un membre de la Chambre des Communes, ne peut donner lieu à poursuite, si elle n’est rédigée par écrit, signée et adressée à la Chambre.
Art. 96. Si après avoir délibéré en la forme prescrite par l’article 79, la Chambre admet la dénonciation, elle le déclare en ces termes: “la dénonciation contre ____ pour le fait de ____ datée du ____ signée du ____ est admise.”
L’inculpé est alors appelé; il a pour comparaître un délai fixé par la Chambre, et, alors qu’il comparait, il est entendu dans l’intérieur du lieu des séances.
Art. 97. Soit que l’inculpé se soit présenté ou non après ce délai, la Chambre sur l’examen des faits, déclare s’il y a lieu ou non à poursuite.
Art. 98. Toute délibération relative à l’accusation d’un Représentant des Communes est prise à l’appel nominal et au scrutin secret.
Art. 99. L’accusation admise contre un Représentant des Communes entraîne suspension.
Art. 100. S’il est acquité par le jugement de la Haute Cour de Justice, il reprend ses fonctions.
Sénat
Art. 101. Le Sénat est composé de vingt-quatre membres et ne pourra jamais excéder ce nombre.
Art. 102. La Chambre des Représentans des Communes nomme les Sénateurs. Leurs fonctions durent neuf ans.
Art. 103. Pour être Sénateur, il faut être âgé de trente ans accomplis.
Art. 104. Tout citoyen peut indistinctement prétendre à la charge de Sénateur, par ses vertus, ses talens et son patriotisme.
Art. 105. Les fonctions militaires seules ne sont point incompatibles avec celles de Sénateur.
Art. 106. Un militaire nommé au Sénat ne peut cumuler deux indemnités; il optera entre l’indemnité de Sénateur et celle de son grade militaire.
Art. 107. A la session qui précédera l’époque du renouvellement des Sénateurs, le Pouvoir Exécutif forme une liste de trois Candidats pour chaque Sénateur à élire, pris dans la généralité des Citoyens, qu’il adresse à la Chambre des Communes.
Art. 108. La Chambre des Communes élit parmi les Candidats proposés, le nombre de Sénateurs prescrit pour former le Sénat, et leur élection se fait au scrutin secret.
Art. 109. Le même mode d’élection sera suivi dans les cas de mort, démission &c. des Sénateurs, et la nomination aux places vacantes se fera dans huit jours au plus tard.
Art. 110. Le Sénat instruira le Résident d’Haïti de la nomination des nouveaux Sénateurs, lesquels devront se rendre à leurs fonctions dans le delai de quinze jours après la notification, de leur élection.
Art. 111. Les Sénateurs à élire ne pourront dans aucun cas être pris parmi les Membres de la Chambre des Communes en fonction.
Art. 112. Un Sénateur ne peut être réélu qu’après un intervalle de trois années.
Art. 113. Le Sénat est chargé du dépôt de la Constitution.
Art. 114. Le Sénat est permanent; il ne peut s’ajourner pendant la session de la Chambre des Représentans des Communes.
Art. 115. Le siège du Sénat est fixé au Port-au-Prince, sauf les cas prévus par l’article 76.
Art. 116. Ses séances sont publiques, il peut quand il le juge convenable, délibérer à huit clos.
Art. 117. La majorité absolue de ses membres réunis, constitue le Sénat.
Art. 118. Le Sénat annonce par un Message au Chef du Pouvoir Exécutif l’ouverture de ses séances.
Il prévient par la même voie, la Chambre des Représentans des Communes et le Président d’Haïti, des remplacemens à faire dans son sein pour cause de mort, démission &c, d’un ou de plusieurs de ses membres.
Art. 119. Le Sénat installe les nouveaux Sénateurs, et reçoit leur serment de fidélité.
Art. 120. Les Sénateurs reçoivent du Trésor public, une indemnité annuelle de seize cents gourdes.
Art. 121. Le Sénat correspond directement avec le Président d’Haïti pour tout ce qui intéresse l’administration des affaires publiques en général; mais ne peut, en aucun cas l’appeler dans son sein pour faits de son administration.
Art. 122. Toute correspondance individuelle touchant les affaires publiques, est interdite entre les membres du Sénat et ceux de la Chambre des Communes.
Art. 123. Au Sénat seul il appartient de nommer le Président d’Haïti: toute autre nomination est illégale et attentoire à la Constitution.
Art. 124. Le Sénat sur la dénonciation du Chef du Pouvoir Exécutif ou de la Chambre des Communes, rend des decrêts d’accusation contre les Agens Comptables et les membres du Corps Judiciaire; lesquels ne peuvent être jugés par les Tribunaux ordinaires sans cette formalité.
Art. 125. La Constitution attribue au Sénat le Pouvoir de sanctionner ou de rejetter tous traités de paix, d’alliance ou de commerce, faits par le Président d’Haïti avec les Puissances Etrangères, ainsi que les déclarations de guerre.
Art. 126. Le Sénat décrète les sommes qui doivent être affectées à chaque partie du service public, d’après le budjet de dépense fourmi par le Secrétaire d’Etat.
Art. 127. Ni le Sénat, ni la Chambre des Communes ne peuvent déléguer les pouvoirs qui leur sont attribués par la Constitution.
Ils ne peuvent non plus s’immiscer dans les causes judiciaires, ni dans les attributions du Pouvoir Exécutif.
Art. 128. La responsabilité devant essentiellement peser sur le ou les Secrétaires d’Etat ainsi que sur les autres grands fonctionnaires, le Sénat et la Chambre des Représentans des Communes, peuvent les mander pour les entendre, soit sur les faits de leur administration ou de l’inexécution des lois qui les concernent.
Les Fonctionnaires désignés au présent article, appelles pour ces causes, sont entendus en comité général, et s’il résulte de leur conduite, preuve de malversation, dillapidation ou tout autre délit tendant à renverser la constitution, et de compromettre la sûreté de l’Etat, le Sénat rend un décret d’accusation contre eux.
Art. 129. Les dits fonctionnaires ainsi décrêtés d’accusation, sont suspendus de leur fonction et renvoyés à la Haute Cour de Justice pour être jugés conformément aux lois.
Art. 130. Tout fonctionnaire acquité par la Haute Cour de Justice reprend de droit ses fonctions.
Art. 131. Les Sénateurs et les Représentans des Communes jouissent, tant en fonction que hors, du respect des Citoyens.
La garantie nationale et législative des Sénateurs ainsi que leur responsabilité envers la Nation, leur est commune avec les Représentans des Communes comme il est prévu par les articles 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99 et 100.
Art. 132. Toute loi adressée au Sénat, par la Chambre des Communes sera soumise aux formalités exigées par les articles 82, 83, 84 et 85.
Art. 133. Toute loi acceptée par le Sénat, portera cette formule: “Le Sénat décrète l’acceptation de (telle Loi portant tel titre) laquelle sera, dans les vingt-quatre heures expédiée au Président d’Haïti, pour avoir son exécution suivant le mode établi par la Constitution.”
Art. 134. Dans les cas de rejet d’une Loi proposée par la Chambre des Représentans des Communes, le Sénat ne sera point tenu d’en déduire les motifs.
Art. 135. Le Sénat exerce sur ses membres la même police que celle prescrite par l’article 77, pour ceux de la Chambre des Représentans des Communes.
Art. 136. Lorsque le Sénat s’ajournera, il laissera un Comité permanent ce Comité ne pourra prendre aucun arrêté que pour sa convocation.
TITRE VI
Promulgation des Lois
Art. 137. Le Président d’Haïti fait sceller les Lois et Décrets du Corps Législatif dans les deux jours après leur réception.
Art. 138. La Promulgation des Lois et des actes du Corps Législatif est faite en ces termes. “Au nom de la République, le Président d’Haïti ordonne que (Loi ou Décret) du Corps Législatif ci-dessus, soit revêtu du sceau de la République, publié et exécuté.”
Art. 139. Toute Loi est obligatoire dans les vingt quatre heures de sa promulgation pour la capitale de la République; dans les trois jours pour son arrondissement; dans les huit jours pour les autres arrondissements du Département, et dans un mois pour toute la République.
Art. 140. En aucun cas, la promulgation des actes du Corps Législatif ne peut être suspendue.
TITRE VII
Pouvoir Exécutif
Art. 141. Le Pouvoir Exécutif est délégué à un Magistrat qui prend le titre de President d’Hayti.
Art. 142. Le Président d’Haïti est à vie.
Art. 143. Le Président avant d’entrer dans l’exercice de ses fonctions prêtera par devant le Sénat, le serment suivant: Je jure à la Nation, de remplir fidèlement l’office de Président d’Haïti, de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution; de respecter et de faire respecter les droits et l’indépendance du Peuple Haïtien.
Art. 144. Si le Président n’a point prêté le serment ci-dessus, dans le délai de quinze jours après la notification de son élection, il est censé s’y être réfusé, et le Sénat procédera dans les vingt-quatre heures, à une nouvelle élection.
Art. 145. Pour être Président, il faut être âgé de trente-cinq ans.
Art. 146. Tout citoyen de la République est éligible à l’Office de Président d’Haïti.
Art. 147. En cas de vacance par mort, démission ou déchéance du Président, le ou les Secrétaires d’Etat exerceront en conseil, l’Autorité Exécutive jusque l’élection d’un nouveau Président.
Art. 148. Si le Sénat n’est pas assemblé, son Comité permanent le convoquera extraordinairement pour qu’il procède sans délai à l’élection d’un Président.
Art. 149. Le Président pourvoit d’après la loi, à la sûreté extérieure et intérieure de la République.
Art. 150. Il peut faire des Proclamations conformes aux lois et pour leur exécution.
Art. 151. Il commande la force Armée de terre et de mer.
Art. 152. Il surveille et assure l’exécution des lois dans les Tribunaux, par des Commissaires à sa nomination qu’il peut révoquer à volonté.
Art. 153. Il propose les lois, excepté celles qui regardent l’assiète, la quotité, la durée et le mode de perception des contributions publiques, leur accroissement ou diminution; elles sont discutées, adoptées ou rejettées par la Chambre des Communes, qui dans les cas motive son rejet.
Art. 154. Les projets que le Président propose, sont rédigés en article, en tout état de discution de ces projets, le Président peut les retirer, il peut les reproduire, modifier à la prochaine session de la Chambre.
Art. 155. Il peut faire tout traité de commerce, d’alliance et de paix avec les Nations Etrangères, ainsi que les déclarations de guerre,: lesquels ne valideront qu’après avoir reçu la sanction du Sénat.
Art. 156. Il nomme les Agens près les Puissances ou Gouvernemens Etrangers, qu’il révoque à volonté.
Art. 157. Il nomme également tous les Fonctionnaires Civils et Militaires, et détermine le lieu de leur résidence.
Art. 158. Les relations extérieures et tout ce qui peut les concerner appartiennent au Président d’Haïti.
Art. 159. Si le Président d’Haïti est informé qu’il se trame quelque conspiration contre la sûreté intérieure de l’Etat, il peut décerner des mandats d’arrêts contre les auteurs et complices: mais il est obligé sous les peines portées contre le crime de détention arbitraire, de les renvoyer dans le délai de deux jours par-devant le Tribunal habile à les juger.
Art. 160. Le Président d’Haïti reçoit une indemnité annuelle de Quarante mille gourdes.
Art. 161. Le Pouvoir Exécutif surveille la perception et le versement des contributions et donne tous les ordres à cet effet.
Art. 162. Il surveille également la fabrication des monnaies par des Agens à son choix.
Art. 163. Au Sénat seul il appartient d’examiner et de décréter la culpabilité du Président d’Haïti.
Art. 164. La Constitution accorde au Président d’Haïti le droit de désigner le Citoyen qui devra lui succéder.
Ce choix sera consigné dans une lettre autographe cachetée et adressée au Sénat, laquelle ne pourra être ouverte avant la vacance de la Présidence.
Ce Dépôt sera gardé dans une cassette particulière fermant à deux clefs différentes, dont l’une restera entre les mains du Président d’Haïti et l’autre entre celles du Président du Sénat.
Art. 165. Le Président peut à sa volonté retirer son choix et le remplacer de la même manière que ci-dessus.
Art. 166. Le Sénat admet ou rejette le citoyen désigné par le Président d’Haïti pour lui succéder.
En cas de rejet, il procède dans les vingt quatre heures à la nomination du Président d’Haïti.
Art. 167. II y aura près du Président d’Haïti, un Secrétaire-Général chargé du travail personnel.
TITRE VIII
Pouvoir Judiciaire
Art. 168. Il sera créé un Grand-Juge, chargé de l’administration de la Justice et dont les attributions seront établies par la Loi.
Art. 169. Les Juges ne peuvent s’immiscer dans l’exercice du Pouvoir Législatif, ni faire aucun réglement.
Art. 170. Ils ne peuvent arrêter m suspendre l’exécution l’aucune Loi, ni citer devant eux les Administrateurs pour raison de leur fonction.
Art. 171. Nul ne peut être distrait des Juges que la Loi lui assigne, par aucune Commission, ni par d’autres attributions que celles qui sont déterminées par une Loi antérieure.
Art. 172. Les Juges, les Commissaires du Pouvoir Exécutif et leurs Substituts près les Tribunaux, sont salariés par l’Etat.
Art. 173. Les Juges ne peuvent être destitués que pour forfaiture légalement jugés; ni suspendus que par une accusation admise.
Art. 174. Les Juges, les Commissaires du Pouvoir Exécutif et leurs Substituts, ne peuvent être distraits de leurs fonctions pour aucun service public, à moins d’un danger éminent.
Art. 175. L’ascendant et le descendant en ligne directe, les frères, l’oncle et le neveu, les cousins au premier degré et les alliés à ces divers degrés ne peuvent être simultanément membres du même Tribunal.
Art. 176. Les Séances des Tribunaux sont publiques; les Juges délibèrent en secret; les jugemens sont prononcés à haute voix; ils sont motivés.
Art. 177. Nul Citoyen s’il n’est âgé de vingt-cinq ans au moins, ne peut être juge ni Commissaire du Pouvoir Exécutif.
De la Justice Civile
Art. 178. Il ne peut être porté atteinte au droit de faire prononcer sur leurs différends par des arbîtres du choix des partis.
Art. 179. La décision de ces arbîtres est sans appel si les parties ne l’ont expressément réservé.
Art. 180. Le Pouvoir Législatif détermine par une loi, le nombre des Juges de Paix et de leurs assesseurs dans chaque Département.
Art. 181. Le loi détermine également les objets dont les Juges de Paix et leurs Assesseurs connaissent en dernier ressort; elle leur en attribue d’autres qu’ils jugent à charge d’appel.
Art. 182. Les affaires dont le jugement n’appartiennent point aux Juges de Paix, peuvent être portées immédiatement devant eux pour être conciliées; si le Juge de Paix ne peut les concilier, il les renvoit pardevant le Tribunal Civil.
Art. 183. La loi détermine le nombre des Tribunaux dans chaque Département. Les lieux où ils sont établis, leur mode d’organisation et le territoire formant leur ressort.
Art. 184. II y aura près de chaque Tribunal Civil un Commissaire du Pouvoir Exécutif, un Substitut et un Greffier.
Art. 185. Le Tribunal Civil prononce en dernier ressort dans les cas déterminés par la loi, sur les appels des jugemens, soit des Juges de Paix, soit des arbitres, soit des Tribunaux d’un autre Département.
De la Justice Criminelle
Art. 186. Nul ne peut être saisi que pour être conduit devant l’Officier de Police, et nul ne peut être mis en état d’arrestation, ou détenu qu’en vertu d’un mandat d’arrêt des Officiers de Police ou du Pouvoir Exécutif dans le cas de l’article 159. d’un Decrêt de prise de corps d’un Tribunal ou d’un decrêt d’arrestation du Pouvoir Législatif, dans les cas où il lui appartient de le prononcer ou d’un jugement de condamnation à la prison.
Art. 187. Pour que l’acte qui ordonne l’arrestation puisse être exécuté, il faut
1.° qu’il exprime formellement le motif de l’arrestation et la loi en conformité de laquelle elle est ordonnée,
2.° qu’il ait été notifié à celui qui en est l’objet et qu’il lui en ait été laissé copie.
Art. 188. Toute personne saisie et conduite devant l’Officier de Police, sera examinée sur le champ ou dans le jour même au plus tard.
Art. 189. S’il résulte de l’examen, qu’il n’y a aucun sujet d’inculpation contre elle, elle sera remise aussitôt en liberté; ou s’il y a lieu de l’envoyer à la Maison d’Arrêt, elle y sera conduite sous le plus bref délai, qui, en aucun cas, ne pourra excéder trois jours.
Art. 190. Nulle personne arrêtée ne peut être retenue, si elle donne caution suffisante, dans les cas où la loi permet de rester libre sous cautionnement.
Art. 191. Nulle personne dans le cas où sa détention est autorisée par la loi, ne peut être conduite ou détenue que dans les lieux légalement et publiquement désignés pour servir de prison.
Art. 192. Nul gardien ou concierge ne peut recevoir ni retenir aucune personne qu’en vertu d’un mandat d’arrêt dans les formes prescrites par les articles 159, et 161, d’un decrêt de prise de corps, d’un decrêt d’accusation, ou d’un jugement de condamnation à la prison et sans que la transcription n’ait été faite sur son registre.
Art. 193. Tout gardien ou concierge est tenu, sans qu’aucun ordre puisse l’en dispenser, de représenter la personne détenue a l’Officier Civil ayant la police de la Maison de détention, toutes les fois qu’il en sera requis par cet officier.
Art. 194. La représentation de la personne détenue ne pourra être refusée à ses parens et amis porteurs de l’ordre de l’officier, lequel sera toujours tenu de l’accorder, à moins que le concierge ne représente une ordonnance du Juge transcrite sur son registre pour tenir la personne arrêtée en secret.
Art. 195. Tout homme quelle que soit sa place ou son emploi, autre que ceux à qui la loi donne le droit d’arrestation, qui donnera, signera, exécutera ou fera exécuter l’ordre d’arrêter un individu, ou quiconque dans le cas même d’arrestation autorisée par la loi, conduira, recevra ou retiendra un individu dans un lieu de détention non publiquement et légalement désigné; et tout gardien ou concierge qui contreviendra aux dispositions des articles précédens, seront poursuivis comme coupable du crime de détention arbitraire.
Art. 196. Toutes rigueurs employées dans les arrestations, détentions ou exécutions autres que celles prescrites par la loi, sont des crimes.
Art. 197. La loi détermine le nombre des Tribunaux Criminels dans chaque Département, les lieux où ils seront établis, leur mode d’organisation et le territoire formant leur ressort.
Art. 198. Les Juges Civils peuvent exercer les fonctions des Juges Criminels.
Art. 199. Le Pouvoir Législatif pourra établir la procédure par juris en matière criminelle.
Art. 200. Il sera établi un Tribunal de Cassation pour toute la République, dont le mode d’organisation et les attributions seront fixés par la loi.
Art. 201. Le Pouvoir Exécutif dénonce à ce Tribunal, sur la plainte des parties interressées et sans préjudice du droit de ces dites parties, les actes, et les jugemens dans lesquels les Juges ont excédé leurs pouvoirs.
Art. 202. Le Tribunal de Cassation annulle ces actes s’ils donnent lieu à forfaiture, il met en état d’accusation les prévenus après les avoir appelés et entendus.
Art. 203. Le Tribunal de Cassation ne peut prononcer sur le fond du procès, il le renvoie au Tribunal qui doit en connaître.
Art. 204. Les Délits Militaires sont soumis à des Conseils Spéciaux et à des formes particulières de jugement, déterminées par la loi.
Haute Cour de Justice
Art. 205. Il y aura une Haute Cour de Justice pour juger les accusations admises par le Corps Législatif, soit contre ses propres membres, soit contre le Président d’Haïti, ou contre le ou les Secrétaires d’Etat ou tous autres Grands Fonctionnaires publics.
Art. 206. La Haute Cour de Justice ne se forme qu’en vertu d’une Proclamation du Sénat.
Art. 207. Elle siège dans le lieu qui lui est désigné, lequel ne peut être qu’à douze lieues de celui où réside le Sénat.
Art. 208. Lorsque le Sénat a proclamé la formation de la Haute Cour de Justice, elle se compose d’un nombre de Juges pris au sort dans les différens Tribunaux des Départemens.
Ce nombre ne peut être moindre de quinze, et ils sont présidés par le Grand-Juge.
Art. 209. Dans le cas ou le Grand-Juge serait lui mémo en état d’accusation, le Président d’Haïti désignera parmi les Grands Fonctionnaires Publics, celui qui présidera la Haute Cour de Justice.
Art. 210. Les jugemens de la Haute Cour de Justice étant sans appel, l’accusé aura le droit de recuser un tiers de ses Juges et les jugemens ne se rendront qu’au tiers des voix.
TITRE X
De l’Agriculture et du Commerce
Art. 211. L’Agriculture, première source de la prospérité des Etats, sera protégée et encouragée.
Son accroissement et sa durée dépendent uniquement de la confiance et de la justice qui doivent réciproquement exister entre le Propriétaire et le Cultivateur.
Art. 212. La police des campagnes sera soumise à des lois particulières.
Art. 213. Le Commerce, autre source de félicité publique, ne souffrira point d’entraves et recevra la plus grande protection.
Art. 214. La personne des étrangers ainsi que leurs établissemens de Commerce dont placés sous la loyauté et la sauvegarde de la Nation.
TITRE XI
Du Secrétaire d’Etat
Art. 215. Il y aura un Secrétaire d’Etat nommé par le Président d’Haïti et qui résidera dans la Capitale de la République.
Art. 216. La loi fixera les attributions du Secrétaire d’Etat.
Art. 217. Les comptes détaillés des dépenses publiques, signés et certifiés par le Secrétaire d’Etat, sont arrêtés le trente un Décembre de chaque année, pour être rendus à la Chambre des Représentans des Communes, au commencement de chaque session.
Il en sera de même des états de recette de diverses contributions de tous les revenus publics.
Art. 218. Les états de ces dépenses et recettes sont distingués suivant leur nature: ils expriment les sommes touchées et dépensées, année par année, dans chaque partie de l’Administration générale.
Art. 219. Le Secrétaire d’Etat et le Grand-Juge, sont respectivement responsables de l’inexécution des lois rendues par le Corps Législatif ainsi que des actes du Pouvoir Exécutif.
Art. 220. Ces deux Grands Fonctionnaires sont les Orateurs chargés de porter la parole, au nom du Pouvoir Exécutif devant le Sénat et la Chambre des Représentans des Communes.
Art. 221. Sur la proposition du Président d’Haïti, la Chambre des Représentans des Communes pourra créer d’autres offices de Secrétaire d’Etat, si les besoins du service l’exigent.
Au Grand-Goave, le 2 Juin 1816, an 13.
Signé a l’Original, Pierre Andre, N. Viallet, Joseph George, M. Boisrond, Manigat, Brice, Ligonde, Eloy, J. Simon, Cavalie, A. D. Sabourin, Président, N. D. Lafargue & Douge aîné Secrétaires.
(Plus bas est écrit)
Les articles 80 & 201, sont ainsi conçus.
Art. 80. Les Membres de la Chambre des Communes reçoivent une indemnité évaluée à Deux cents gourdes par mois pendant leur session, et Une gourde par lieue qu’ils auront à faire pour se rendre au siège du Gouvernement, laquelle indemnité est à la charge de leur Commune respective, d’après le mode qui sera établi par la loi.
Art. 201. Le Pouvoir Exécutif dénonce à ce Tribunal sans préjudice des parties intéressées, les actes et jugemens dans lesquels les Juges ont excédé leur pouvoir.
(Signé) Pierre Andre, N. Viallet, Joseph George, Manigat, Eloy, Brice, M. Boisrond, J. Simon, Ligonde, A. D. Sabourin Président, Douge aîné & N. D. Lafargue Secrétaires,
L’Assemblée de Révision, considérant ses travaux finis, se déclare dissoute. En conséquence elle a arrêtée que les députés Boisrond, Eloy et Brice sont chargés de porter au Sénat Haïtien, le présent Acte de Révision.
Au Grand-Goave, le 2 Juin 1816, an 13 de l’Indépendance.
(Signé) A. D. Sabourin, Président, Laforgue & Douge aîné, Secrétaires.
Pour Copie conforme à l’Original déposé et enrégistré dans les Archives publiques.
A la Maison Nationale, Port-au-Prince, le 23 Juin 1816, an 13 de l’Indépendance d’Haïti.
- B. Bayard, Président,
- Simon, Secrétaire.
[1] Based on Révision de la Constitution Haïtienne de 1806, Port-au-Prince: Imprimerie du Gouvernement, 1816.